Livre augmenté : dtdpc-46

Chapitre 46 – Découverte de l'Afrique noire

Page 292 de l'ouvrage

Premiers pas en Afrique de l’Ouest.
Un autre monde, tant sur le plan géographique, climatique et culturel que professionnel.
Pour comprendre et assimiler un petit morceau d’Afrique et une parcelle de la radiodiffusion vue de Libreville, il était indispensable de mettre de côté ses acquis et certitudes européennes.
Les diverses missions des Blancs en poste sur ce projet devaient nécessairement transmettre le savoir aux exploitants locaux, sans toutefois leur imposer des méthodes ou des concepts étrangers à leurs usages.
Cette dissociation, peu naturelle, lorsqu’on transmet ce que l’on sait, fut à l’origine de bien des difficultés, d’étonnements et d’anecdotes plus invraisemblables les unes que les autres, si elles sont analysées du côté de l’hexagone !

Africa n°1

L’immeuble d’Africa n°1, situé en bas du boulevard Triomphal, à une cinquantaine de mètres du bord de mer, abritait tous les services de la radio. Les studios, répartis sur l’ensemble du rez-de-chaussée, bénéficiaient de larges baies vitrées donnant sur le boulevard.

Bowling Store

Adjacent à l’immeuble d’Africa n°1, un superbe bowling attirait surtout la population expatriée et constitua rapidement le point de rencontre des français travaillant à la radio, ces derniers s’y retrouvant autour des pistes, afin de décompresser un peu des activités professionnelles.

M’Bolo

L’hypermarché M’Bolo (Bonjour) – photo réalisée de la terrasse supérieure de l’immeuble de la radio – offrait des produits alimentaires importés. En y mettant le prix, il était possible d’y trouver quasiment tous les produits disponibles dans un hyper français. A droite, le boulevard Triomphal, large avenue en 2 x 2 voies séparées par une bande fleurie.

Le hall d’accueil de ce qui aurait dû être un hôtel cinq étoiles sous l’enseigne Sheraton.
Tout était prêt, jusqu’aux éclairages.
Il ne manquait plus que le mobilier et la literie dans les chambres.
Puis le projet sombra dans l’oubli, comme de nombreux autres nés dans la démesure des envies de grandeur des dirigeants du pays.
Mais dans ce hall immense, les autorités avaient décidé d’y entreposer les centaines de caisses contenant la totalité des équipements techniques de la future et grandiose maison de la radio…
Dont seules quelques fondations laissées à l’abandon pouvaient encore témoigner du projet !

L’hôtel Sheraton…

 

 

Quelques heures après mon arrivée à Libreville, on me guida vers l’ampleur de la tâche…

Pas de liste de colisage et aucune référence claire sur les caisses pouvant laisser deviner les contenus.
Nous disposions juste d’un pied de biche, de nos cervelles et surtout de notre pifomètre, pour tenter d’identifier les caisses renfermant les matériels que nous recherchions…

 

Votre serviteur (1,76m) donne une idée de la taille des caisses.
A gauche, l’une d’entre elles, ouverte, laisse deviner la présence d’une console de mixage.

Il fallait rester attentif et éviter d’ouvrir les caisses au hasard.
En effet, chaque entaille de la peau protectrice en aluminium signait l’arrêt de mort des équipements si nous devions les laisser sur place plus d’une semaine.
En cause, les niveaux d’hygrométrie et de température très élevés dans cette zone confinée, qui ne bénéficiait d’aucune climatisation.

 

 

L’assemblage et le câblage des 4 régies techniques des studios d’Africa n°1 furent réalisés en deux semaines.
En y travaillant sept jours sur sept et une bonne partie de chaque nuit !

La régie du studio A

 

 

A peine la régie technique du studio terminée que les sessions de formation des techniciens gabonais enchaînèrent, pour que chacun soit prêt le jour du démarrage officiel de la station.
Sur le cliché, de face, Gaston, l’un des plus sympathiques techniciens d’exploitation de la radio.

Le centre des modulations (CDM)

Le CDM fut sans conteste le « gros morceau » de l’affaire !
Réfléchir et réfléchir encore pour comprendre et finalement trouver la signification de chaque code de câblage, sachant que le constructeur se refusait à fournir le moindre début de commencement du schéma d’installation…
Une fois les combinaisons décryptées, ce fut presque un jeu d’enfant, à défaut d’une mission de tout repos, que de câbler ces milliers de câbles  de liaison.
Toutes ces interconnexions s’avéraient nécessaires pour profiter de façon optimale des puissantes possibilités offertes par les équipements d’amplification, de correction et les nombreux panneaux de brassage présents dans les baies techniques.

 

 

Le câblage est terminé : il fallait maintenant contrôler chaque liaison, chaque fonctionnalité, chaque performance.

Méthode, passion, patience et réparation des erreurs de câblage…

On air !

A droite du pupitre de commandes d’enchaînement des régies des studios, les baies de brassage permettant d’affecter toute source vers toute destination interne ou externe à la maison de la radio.

Le CDM est opérationnel

Les sessions de formation ne furent pas aisées, cette technologie s’avérant relativement complexe pour l’époque, notamment à destination de jeunes techniciens découvrant pour la première fois ce type d’organisation fonctionnelle d’une station de radio.

Le centre émetteur OC

Le centre émetteur ondes courtes d’Africa n°1, le plus puissant du continent africain, se situait dans la province du Haut-Ogoué, à l’extrême est du Gabon, sur la commune de Moyabi, proche du chef-lieu Franceville. Soit à environ six cents kilomètres de Libreville.

Là encore, ce qu’il y avait de plus moderne, de plus grand, de plus puissant… Quatre émetteurs de cinq cents kilowatts alimentaient de nombreuses antennes « rideaux » à haut gain, orientées vers les quatre points cardinaux.

Le bâtiment abritant les émetteurs

Le bâtiment abritant les 4 gros émetteurs ondes courtes de la Thomson, dont les circuits d’accord étaient partiellement motorisés afin d’assurer un changement de fréquence ou de bande de fréquences, ou d’antenne dans un laps de temps minimum.

Une des antennes « rideaux »

Le cliché des antennes montre l’un des exemplaires des « rideaux » formés de multiples câbles rayonnants mis en série ou en parallèle, en fonction de la bande de fréquences d’émission et de la directivité souhaitées. Les orages tropicaux (le centre se situait quasi sous l’équateur) se manifestaient de façon soudaine et violente et les problèmes de foudre et donc de disjonction des émetteurs étaient légion.

Les femmes et les hommes d'Africa n°1

Le management de l’équipe de techniciens se révéla complexe de par la profondeur du fossé  culturel séparant les Blancs des Noirs.
La pédagogie, la patience, l’expérience, la compétence furent des outils bien peu efficaces pour tenter de formater l’équipe aux usages radiophoniques réclamés par l’exploitation des matériels pensés, fabriqués et organisés par des européens pour des européens.

En inversant le problème, comment aurais-je pu être formé aux techniques de chasse en brousse par les sages de la tribu de l’Ogoué ?
Il aurait d’abord fallu que je vive plusieurs années au sein de la communauté, que je m’imprègne des usages, pour qu’enfin j’ai une chance de peut-être comprendre et m’approprier les méthodes jugées primaires et pourtant ô combien sophistiquées de la chasse en brousse…

Une petite partie de l’équipe

Une partie de l’équipe technique de la station. Au centre, le Blanc, c’est Christian P. le câbleur m’ayant rejoint lors de différentes missions sur le site.

Le logo de la station aux couleurs du Gabon

Le logo de la station

Notes et références

  • Image immeuble Africa n°1, captée sur la page : accessible ici © Mémoire Sauve Gabon
  • Image de l’immeuble Bowling Store :
    Cliché et collection de l’auteur.
  • Image de l’hypermarché M’Bolo :
    Cliché et collection de l’auteur.
  • Images des caisses à déballer dans le hall de l’hôtel Sheraton :
    image 1 : cliché et collection de l’auteur.
    Image 2 : cliché de Pierre H. Collection de l’auteur.
  • Image de la régie technique du studio A d’Africa n°1 :
    Cliché et collection de l’auteur.
  • Images du CDM Africa n°1 :
    Clichés et collection de l’auteur.
  • Images du centre émetteur de Moyabi, captées sur la page : accessible ici 
  • Image de l’équipe d’Africa n°1 :
    Cliché et collection de l’auteur.
  • Logo Africa n° 1, capté sur la page : accessible ici 
  • Pour en savoir plus :
    Quelques moments de l’histoire d’Africa n°1 sur la page : accessible ici